Adénocarcinome lieberkühnien : symptômes, pronostic

Les adénocarcinomes lieberkühniens sont des tumeurs qui se développent au niveau du tissu glandulaire d'un organe. Le cancer du côlon et du rectum est un adénocarcinome lieberkühnien dans 85% des cas. Explications avec le Dr Benoit Gignoux, chirurgien digestif à la clinique de la Sauvegarde à Lyon.

Adénocarcinome lieberkühnien : symptômes, pronostic
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Définition : c'est quoi un adénocarcinome lieberkühnien ?

Un adénocarcinome lieberkühnien est une tumeur cancéreuse qui se développe au niveau des cellules glandulaires (dites de Lieberkühn) des muqueuses digestives. L'adénocarcinome peut se retrouver sur la totalité du circuit digestif mais ce sont principalement le côlon et le rectum qui sont touchés. "Le type de cancer du côlon et du rectum est un adénocarcinome lieberkühnien dans 85% des cas", précise le Dr Benoit Gignoux, chirurgien digestif à la clinique de la Sauvegarde à Lyon. Selon la Société nationale française de Gastro-entérologie, le cancer colorectal se place au troisième rang des cancers les plus fréquents (après le cancer de la prostate et du sein) avec 45 000 nouveaux cas et 18 000 décès par an.

Quels sont les symptômes d'un adénocarcinome lieberkühnien ?

Les symptômes les plus fréquents sont des douleurs abdominales, des modifications du transit ou la présence de sang dans les selles. Cependant, les signes peuvent être discrets, voire absents, notamment si l'adénocarcinome lieberkühnien est situé sur la partie droite du côlon. Dans ce cas, cela peut entrainer des saignements occultes, c'est-à-dire une anémie progressive dont le patient ne se rend pas compte car le sang est mélangé aux selles. Si l'adénocarcinome touche le rectum (ou partie terminale du colon), le malade peut ressentir des douleurs au niveau du pelvis, des urgences pour aller à la selle, du sang rouge dans les selles ou rectorragie. En cas de cancer avancé, la tumeur peut obstruer le passage des selles et entrainer une occlusion, il s'agit alors d'une urgence chirurgicale.

Quelle est la cause d'apparition d'un adénocarcinome lieberkühnien ?

L'adénocarcinome se développe toujours sur un polype du côlon. Un polype est une tumeur bénigne qui correspond à une multiplication anormale des cellules de la muqueuse devenant alors polype ou adénome. Ces polypes mettent plusieurs années à se former et, avec le temps, certains se transforment et deviennent cancéreux : l'adénome devient alors un adénocarcinome ou cancer invasif. "Il n'y a pas toujours de causes identifiées à l'apparition d'un adénocarcinome. Cependant, des facteurs de risques sont actuellement bien identifiés : l'âge supérieur à 50 ans, la sédentarité, l'obésité, la consommation d'alcool ou de tabac et une alimentation riche en viande rouge ou charcuterie. En revanche, une activité physique régulière et une alimentation riche en fruits et légumes sont protecteurs", explique le Dr Gignoux. Certaines maladies inflammatoires de l'intestin comme la maladie de Crohn ou la Recto colite ulcéro hémorragique présentent un risque augmenté de cancer colique.  Enfin, il existe aussi des facteurs génétiques comme le syndrome de Lynch (ou cancer colique familial) et la polypose adénomateuse familiale qui sont rares mais prédisposent à un cancer colique avant 40 ans.

Comment pose-t-on le diagnostic d'un adénocarcinome lieberkühnien ?

"Le diagnostic est réalisé grâce à une endoscopie du côlon ou une coloscopie soit parce que le patient a fait un dépistage du cancer qui s'est avéré positif, soit car il souffre de douleurs abdominales, de troubles du transit ou de sang dans les selles." Le patient doit alors boire une préparation permettant de vider le côlon de ses selles afin de mieux voir la paroi de la muqueuse. L'examen est effectué sous anesthésie légère et dure généralement entre 15 et 30 minutes. Grâce à l'introduction d'une caméra par l'anus avec insufflation d'air ou de CO2, le médecin peut ainsi explorer l'ensemble de la muqueuse du côlon. "Si on constate la présence d'un polype, on le retire durant l'examen. Si on suspecte une tumeur, on réalise une biopsie qui sera analysée au laboratoire. Les résultats sont reçus dès la semaine suivante. "S'il s'agit d'un cas de cancer du côlon, on effectue un bilan complet qui comprend des prises de sang ainsi qu'un scanner du thorax et de l'abdomen afin de vérifier la présence ou non de métastases", précise le Dr Gignoux. 

Traitement : comment soigner un adénocarcinome lieberkühnien ?

Pour soigner le cancer du côlon, seule la chirurgie est curative. La chirurgie (appelée colectomie) comprend une résection d'une partie du côlon et des ganglions adjacents puis la reconstruction du circuit digestif par une suture entre la partie restante du côlon et le rectum. La colectomie a lieu le plus souvent par coelioscopie avec une hospitalisation de 2 à 5 jours ainsi qu'une prise en charge moderne péri-opératoire de réhabilitation améliorée après chirurgie (RAC). En ce qui concerne le cancer du rectum, un traitement pré-opératoire comportant de la radiothérapie associée ou non à de la chimiothérapie est le plus souvent proposé. Ce traitement pré-opératoire est ensuite suivi d'une résection du rectum avec reconstruction. En fonction du stade du cancer colorectal, une chimiothérapie complémentaire à la chirurgie pourra être proposée.

Quel pronostic avec un adénocarcinome lieberkühnien ?

"Le pronostic dépend du stade de l'adénocarcinome, c'est-à-dire de son extension en profondeur au niveau du colon (T), de l'atteinte ou non des ganglions (N) et de la présence de métastases (M) : c'est la classification TNM. En cas de cancer du côlon non métastatique, le pronostic est bon avec une chirurgie curative. Le pronostic peut être plus réservé dans le cas d'un cancer au stade métastatique. Dans ce cas, seuls 10 à 20% des patients pourront bénéficier d'un traitement à visée curative tandis que les autres auront un traitement pour stabiliser la maladie." Afin que la prise en charge du cancer se fasse au plus tôt, il est important d'effectuer un dépistage du cancer colorectal qui est aujourd'hui recommandé dès 50 ans. Il s'agit d'un test immunologique au niveau des selles qui permet de détecter la présence de saignements occultes. En cas de test positif, une coloscopie sera réalisée afin d'enlever les polypes ou adénomes avant que ceux-ci ne se transforment en cancer. "Compte tenu de la mortalité élevée du cancer colorectal, il est très important que l'ensemble de la population fasse ce test."

Merci au Dr Benoît Gignoux, chirurgien digestif à la clinique de la Sauvegarde à Lyon. Source : Société nationale française de Gastro-entérologie