Traumatisme sonore : symptômes, durée, seuil de danger, traitement

Festivals, concerts, boîtes de nuit... Ces lieux bruyants mettent à mal nos oreilles. Quels sont les symptômes d'un traumatisme sonore ? Quand consulter ? Comment éviter la perte auditive ? Traitement et conseils de prévention avec le Pr Jean-Luc Puel, Directeur de l'Institut des neurosciences à l'Inserm Montpellier.

Traumatisme sonore : symptômes, durée, seuil de danger, traitement
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Définition : c'est quoi un traumatisme sonore ?

Un traumatisme sonore est une atteinte de l'oreille interne, plus ou moins intense, qui provoque une destruction des cellules sensorielles. Lorsqu'elles sont exposées à un son trop fort, ces cellules, appelées "cellules ciliées" vont vibrer et s'endommager. Elles peuvent même mourir si elles sont trop longtemps en contact avec un bruit intense. Ainsi, plus le bruit est fort et plus le risque que le cil de la cellule ciliée se casse est élevé. Le traumatisme sonore peut entraîner une surdité réversible ou irréversible. "Une oreille qui est trop exposée à des sons vieillit prématurément. Au lieu d'avoir une perte d'audition qui survient généralement aux alentours de 60 ans, elle aura lieu à un âge moins avancé. Tout comme notre peau a un capital soleil, notre oreille a un capital audition qu'il faut préserver le plus possible", argue le Pr Jean-Luc Puel, Président de l'association Journée Nationale de l'Audition et Directeur de l'Institut des neurosciences à l'Inserm Montpellier. 

Les traumatismes sonores ne font pas mal, ils sont plutôt inconfortables.

Quels sont les symptômes d'un traumatisme sonore ?

Le traumatisme sonore peut être aigu, c'est-à-dire accidentel et soudain après une exposition à un choc sonore (une explosion, un coup de feu, un blast...). "Juste après le traumatisme, on a immédiatement une sensation d'oreille bouchée ou "cotonneuse" et on peut aussi ressentir des sifflements dans les oreilles", décrit notre interlocuteur. Les traumatismes sonores ne font pas mal, ils nous agressent et sont très inconfortables. Toutefois, si les sons de la vie quotidienne deviennent douloureux, il peut s'agir d'une hyperacousie douloureuse, l'une des complications du traumatisme sonore.

Le traumatisme sonore peut être chronique, résultant d'une exposition prolongée à des sons trop forts (écouter la télévision ou de la musique trop fort, cadre professionnel bruyant...). "Les symptômes sont les mêmes que pour le traumatisme aigu. Ils s'accompagnent d'une difficulté dans le bruit, autrement dit lorsqu'on n'arrive pas à distinguer les paroles de son interlocuteur dans un milieu bruyant (repas de famille, gare, bar, restaurant...)", précise l'expert.  

Quelle est la durée d'un traumatisme sonore ?

Un traumatisme sonore peut durer de quelques secondes à plusieurs heures. 

Un traumatisme sonore est une urgence médicale.

Quand consulter un ORL en cas de traumatisme sonore ?

Un traumatisme sonore est une urgence médicale. "Si vous entendez des sifflements ou des bourdonnements dans les oreilles accompagnés d'une sensation d'oreille bouchée, il faut consulter un ORL au plus vite", insiste le spécialiste. Particulièrement après un concert, un festival de musique ou une soirée en boîte de nuit. "Lorsqu'elles sont endommagées, les cellules sensorielles meurent progressivement, généralement en 3-4 jours, d'où l'intérêt d'intervenir très rapidement", ajoute-t-il. Consultez un ORL si :

  • Vos oreilles sifflotent ou bourdonnent.
  • Vous avez l'impression d'avoir toujours les oreilles bouchées.
  • Vos oreilles vous font mal.
  • Vous entendez des sons même dans un environnement silencieux.
  • Vous avez des difficultés à entendre vos interlocuteurs et particulièrement les voix aiguës ou le son des oiseaux.

Quel est le traitement d'un traumatisme sonore ?

"Le médecin généraliste peut vous orienter vers un ORL. En fonction du diagnostic, ce spécialiste de l'audition peut vous prescrire des corticoïdes, qui vont aider les cellules sensorielles lésées à se réparer, et/ou vous conseiller de faire du caisson hyperbare", indique le spécialiste. Il s'agit d'une technique médicale permettant d'oxygéner et de réparer les tissus. Un appareillage auditif peut être nécessaire. 

Quelles sont les complications d'un traumatisme sonore ?

Les complications d'un traumatisme sonores sont, par ordre de gravité : 

  • La surdité. "La surdité peut être réversible, autrement dit, les cellules ciliées ont été endommagées mais ne sont pas mortes. Elles sont capables de se réparer et la personne est capable de retrouver une audiométrie normale. En revanche, la surdité est irréversible lorsque les cellules sensorielles ont été complètement détruites", indique le Pr Puel. En cas de surdité irréversible, la plupart des sons deviennent imperceptibles, quel que soit l'environnement d'écoute.
  • Les acouphènes. "Attention, les acouphènes sont un symptôme et ne sont pas toujours dus à un traumatisme sonore. Les causes des acouphènes sont nombreuses : une hypertension artérielle, une tumeur du conduit auditif ou de l'oreille interne, une neuropathie, une maladie auto-immune... Dans ces cas-là, il faudra traiter la pathologie et non le symptôme", explique le Pr Puel. 
  • L'hyperacousie douloureuse se caractérise par une intolérance aux sons de la vie quotidienne qui peuvent entraîner des douleurs dans les oreilles et irradier dans le cou voire dans la mâchoire. Résultats : la personne est gênée par le son quelle que soit son intensité. elle ne supporte plus certains bruits normalement tolérés par tout le monde (frottements des couverts, voix, tapotements sur un clavier...), elle a les oreilles perpétuellement bouchées voire congestionnées, elle a des maux de tête et les oreilles qui picotent... 

Quels sont les seuils dangereux pour l'audition ?

Il est difficile de déterminer le seuil dangereux pour l'audition. Tout dépend de l'intensité du son et de la durée d'exposition. "La législation du Travail (l'Institut national de recherche et de sécurité au travail - INRS) estime qu'on peut être exposé pendant 8 heures à 80 décibels sans protection. Si on double la puissance acoustique, c'est-à-dire que l'on passe de 80 dB à 83 dB, la durée d'exposition sans risque n'est plus que de 4 heures, explique le Pr Puel. En revanche, lors d'un concert qui a un niveau sonore généralement compris entre 90 et 110 dB, vous avez tout intérêt à mettre des bouchons d'oreille". L'intérêt des bouchons d'oreille est de protéger l'audition sans altérer les vibrations de la musique (les basses). A noter qu'un décret du Code de la Santé publique de 2017 oblige toutes les salles de concert accueillant plus de 300 personnes à mettre à disposition du public des bouchons d'oreille gratuitement et surtout, à ne pas dépasser 102 décibels. 

Exemples de durées d'exposition en fonction du niveau sonore

Niveau sonore en décibel (dB) Temps d'exposition sans risque
80 8 heures
83 4 heures
86 2 heures
89 1 heure
92 30 minutes
95 15 minutes
98 7 minutes 30
101 3 minutes et 45

Prévention : comment éviter les traumatismes sonores ?

Pour prévenir le risque de lésions et préserver son audition, pensez aux bouchons d'oreille  !

  • Les bouchons d'oreille standards en mousse sont les bouchons classiques mis à disposition lors des festivals, des événements musicaux et des concerts. A usage unique, ils réduisent les nuisances sonores en moyenne de 30%. 
  • Les bouchons d'oreille filtrants sont capables d'atténuer les sons aigus, considérés comme les plus dangereux pour l'audition.
  • Les bouchons d'oreille, réalisés sur-mesure par des audioprothésistes, sont adaptés au conduit auditif de la personne. Ils offrent une grande isolation phonique et sont destinés aux personnes exposés régulièrement au bruit (qui travaillent dans la musique, sur des machines bruyantes par exemple, dans la métallurgie, sur les voies ferrées ou auprès des avions...)
  • Les casques anti-bruit captent le son et inversent l'onde sonore. Ils permettent de réduire le bruit voire de créer un silence total. 

Conseils pour éviter les traumatismes sonores

  • Se boucher les oreilles à l'approche d'un TGV ou d'un avion.
  • Mettre des protections (bouchons d'oreille, casque anti-bruit...) lors d'un concert de musique, d'un festival, en club, lors des travaux de bricolage, de la tonte de la pelouse, au cinéma... 
  • Reposer ses oreilles : comme au volant, faites-une pause loin du bruit régulièrement (toutes les heures par exemple si vous êtes en boîte de nuit ou si vous avez vos écouteurs)
  • Contrôler le volume de la télé, du téléphone ou de la chaîne hi-fi.

Merci au Pr Jean-Luc Puel, Directeur de l'Institut des neurosciences à l'Inserm Montpellier.